Peut-être que je viens de laisser mon coeur sur le trottoir, ou de le trouver sous la lumière d'un lampadaire. Mais c'est la même chose, et peu importe où il se trouve tant qu'il bat. Et je ne veux plus savoir quel est le sujet de mes mots, quelle importance. 
Mes yeux ne sont que deux mondes qui regardent à l'opposé, l'un droit devant lui et l'autre sur les côtés. Un regard à l'affut de tous les détails de l'univers, des moindres séismes, un grain de sable qui s'écoule et c'est ma main qui sursaute ; un tremblement amer qui surgit. Je cherche des orbites, des satellites en fuite. Des échappées belles et langoureuses qui se réunissent dans les bois où d'autres pas ont passé et trépassé, pas mesurés. Et quand mes yeux se ferment, quel monde, quelle odeur ! Nul ne sait car mon esprit est ailleurs, mon esprit s'est évadé il y a quelques années, ou quelques minutes. Tout revient au même car je suis ce fluide mouvement, cette grâce en exergue qui mime la beauté, mais qui n'est que laideur, que substitut. J'ai vécu tes nuages noirs, tes poisons bleus ; mais je ne retiens de la mer que ses vagues. Qui aura pour mes mots des soupirs assez longs, pour balancer ces phrases qui n'en finissent plus jamais, à la renverse ? J'ai vibré sous l'averse, et c'était doux, c'était si clair soudain. Le bleu du ciel m'apparaissait et je levais la main, comme un extraterrestre, priant pour retrouver ma maison. Là-haut. Depuis tous les toits du monde, je ne l'ai jamais approché de si près. Et voilà qu'au niveau 0, les étoiles m'ont souri, m'ont accueilli. Et tu marchais, et tu étais beau. Et j'ai navigué loin de toi parce que j'avais peur, si peur. J'avais peur de tes mouvements, mais surtout peur des miens ; peur de mes pieds trop sales pour marcher près des tiens, peur de mes hanches trop larges qui ne suivaient pas ton rythme. J'étais terrifiée à l'idée que mes poignets tremblent et que tu n'en sois pas heureux. La lune me regardait, les vagues me parlaient, le sable humide tentait d'envahir mes narines, je sentais sous ma langue la mousse d'une bière qui claque fort, et ma peau touchait ma peau, éperdue. Epanouie. Loin des affres des cités roses, des rosés sifflants qui se vident dans les coupes. J'ai feuilleté le livre des signes quand tu regardais ces autres silhouettes, et je baignais dans la plénitude d'une jalousie douce et punissable de la plage blanche à l'infini. 
Alors j'ai regardé vers le ciel, et des fils se tendaient. Les pendus au milieu des astres me regardaient aimablement ; leur bienveillance me réchauffa le coeur, qui battait comme mes paupières ivres. J'ai regardé dans ta direction, allongée. Et tu souriais, pour rien du tout, en écoutant une mélodie de fin du monde. 
Et puis, tu sais, le temps s'est tu.

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